La colère : ce rapport de force qui détruit nos relations
Nous connaissons tous l’importance des midots dans la construction de l’individu. Nos maitres nous enseignent que la Thora et les Mitsvots nous ont été données afin de nous permettre de nous raffiner. Les bonnes Midots vont jouer un rôle primordial à l’intérieur de la famille.
La présence de mauvaises Midots est un élément qui peut se révéler destructeur non seulement pas juste pour le couple mais aussi pour l’éducation des enfants.
Parmi celle-ci, je voudrai m’arrêter sur la Midda de Kaas : la colère. Afin de nous faire prendre la mesure de celle-ci, les Hahamim comparent celui qui se met en colère à une personne qui se consacre à l’idolâtrie.
Au moment où il se met en colère, l’homme s’affranchi de toutes les limites et cela peut entrainer des catastrophes. Afin de pouvoir travailler efficacement sur la colère, nous allons essayer de réfléchir à ce qui peut en être à l’origine.
Il existe plusieurs raisons à la colère, parmi celles-ci nous allons en analyser, une des causes.
Ayant grandi dans un univers avec ses différents rites et habitudes, nous avons tous un certain nombre de schéma sur la manière dont devrait se passer un bon nombre de situations. Il arrive que la réalité ne corresponde pas à ce que nous aurions voulu qu’elle soit et c’est à ce moment là où notre réaction peut être de la colère.
Un premier travail consisterait à partir du principe que ce n’est pas parce que nous pensons que telle chose devrait se passer de telle manière que la réalité soit ainsi. Etre prêt à imaginer que nos schémas ne sont pas absolus. Ceci n’est pas simple car cela nous demande de développer une certaine souplesse d’esprit. Une fois que ce travail est « réalisé » il serait bon de prendre conscience que la colère équivaut à utiliser le principe du rapport de force dans la relation à l’autre soit pour l’obliger à fonctionner comme nous le désirons soit pour l’amener à faire ce que nous voulons.
Or comme cela fonctionne généralement nous allons nous retrouver face à un réel danger. Nous nous habituons en effet, à construire notre univers relationnel sur un principe de rapport de force.
Ceci risque de marcher, mais je n’ose imaginer de quelles manières celui qui en est victime nous (de)considère. En dehors de cela c’est un système qui risque de trouver ses limites le jour où le rapport de force ne sera plus a notre avantage. On peut voir cela de manière particulière dans la relation avec les adolescents qui lorsque ils étaient enfants, se pliaient à notre volonté dés lors que nous utilisions l’arme de la colère mais qui arrivés à l’adolescence le rapport de force n’était plus le même n’y sont plus sensibles .Ceci est valable aussi dans le couple, les colères ne fonctionnant que lorsqu’on a peur de son conjoint. Dés le moment ou l’on s’affranchi de cette peur ce système ne fonctionne plus du tout.
Le danger supplémentaire réside dans l’expression de cette colère qui peut passer par des mots extrêmes, voire même par des gestes totalement déplacés. Lorsque la colère a généré ce genre de chose si demander par la suite pardon est facile le pardon reste difficile a accorder et même si celui-ci est donné, les traces des mots et des gestes restent imprimés longtemps dans le souvenir de la victime.
Ceci est aussi valable pour les enfants qui seront obligés d’utiliser toutes sortes de moyen pour échapper à cette souffrance de voir ces attitudes destructrices de leurs parents à leurs égards.
Nos sages insistent beaucoup sur les dommages que peut représenter cette colère sur la personnalité de l’enfant.
Ceci devrait nous permettre de trouver les ressources à l’intérieur de nous pour commencer à effectuer en profondeur un travail par rapport à ce défaut. Certains argueront que l’on voit parfois des personnes de Thora quelque fois fort respectables se mettre en colère ; ce qui nous pousserait à vouloir « cacheriser »ce trait de caractère. Alors pour ceux qui voudraient trouver une forme de justification dans ce type de personne, je me permets juste de citer cet enseignement de Maimonide : « le sage se distingue entre autre par sa manière calme et pondéré d’agir et par une parole sereine avec les créatures ». Rappelons nous aussi que dans une famille dans laquelle la colère est présente nos enfants auront tendance à reproduire le même schéma dans les relations qu’ils auront dans la fratrie et avec leurs autres camarades.
Comment en effet demander à un enfant d’imaginer un autre modèle de réaction lorsque quelque chose qui le dérange, que celui auquel il a été habitué à la maison. Alors en conclusion de ce qui ne peut pas être une conclusion mais juste un début de travail. Prenons sur nous au moins une fois par jour comme nous l’enseigne le rav Wolbe dans le Ale Chour ; de ne pas réagir immédiatement quand une chose nous dérange, de supporter quelques minutes et de réaliser a travers cela qu’il est possible d’imaginer une autre réaction que celle qui est tellement facile mais tellement destructrice… La colère.
Rav Elie Lemmel